Après Nazutti le flic haineux du roman Versus, après le flic
insensible à la douleur dans Anaisthêsia, voici le flic amoureux dans Une
histoire d’amour radioactive.
Chez Antoine Chainas, l’ambiance générale n’est pas à l’eau
de rose. Ou alors, une eau trouble. La mort, la maladie, la contagion et le
pourrissement des corps restent des thématiques fortes. On pense parfois à
Cronenberg ; il faudrait poser la question à l’auteur, un jour.
L’écriture d’Une histoire d’amour radioactive semble plus
maîtrisée. Le style reste le même, à base de phrases courtes. Débarrassé de trop
d’effets, il gagne en force, même si certaines lourdeurs persistent (le
personnage ne crie pas, ne marmonne pas, il "hulule", page 230).
Les personnages, justement, sont toujours ceux de la marge.
Ils souffrent, ils sont blessés mais c’est cela qui les rend conscients. Les
deux flics homos, la femme mystérieuse ou encore le DRH qui largue son travail... les
héros de Chainas sont des individus en rupture avec la norme, de rares élus qui
s’accomplissent dans la souffrance. Elle est incarnée par une femme qui les éveille
à la vie en les rendant malades. Cette contamination se transforme en une sorte d'expérience
mystique qui les met sur la « bonne route ». À leurs côtés, amis,
famille ou collègues sont sains mais morts. La population est majoritairement faite de
consommateurs passifs, à l’image des épouses de ces hommes contaminés soudain
pleins du « sentiment de connaître des choses que tous les autres
ignorent ».
Comme dans Anaisthêsia la question revient : peut-on
connaître le bonheur sans souffrir ? Antoine Chainas n'a pas publié d'autre roman depuis Une histoire d'amour radioactive, on attendra donc pour avoir d'autres éléments de sa réflexion.
Antoine Chainas, Une histoire d'amour radioactive, Gallimard/Série Noire, 2010, 14,50 euros, 276 p.
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