Après, "et si vous vous retrouviez enfermés dans une grotte ?" (Vertige), voici "et si vous vous retrouviez enfermé dans un hôpital psychiatrique" ?
Dans Vertige les personnages n'avaient aucune idée de la raison de leur présence au fond d'un trou. Dans Puzzle, les 8 hommes et femmes sont volontaires pour un enfermement supposé durer 5 jours. Ils participent à un jeu de rôle qui peut leur faire gagner 300 000 euros. Sauf que... Bien sûr, rien ne sera simple.
Qu'est-ce qui fait fonctionner Puzzle ?
Pas les personnages, dont on se fiche complètement. Leurs caractéristiques sont réduites à celles d'une fiche de jeu, empêchant toute empathie. La bâtisse immense et enneigée qui les accueille/séquestre dégage plus de puissance. Il y a bien Ilan, le jeune homme à la mémoire défaillante et aux parents mystérieusement disparus. Mais le lecteur a beau être placé de son côté, le roman se déroule sans véritable engagement.
Pas le style, qui fait dans le fonctionnel.
Pas le fond, la multiplicité ou la réflexion, inexistants.
Ce qui fonctionne, c'est l'envie de savoir. La curiosité, le pourquoi ? Alors, on tourne les pages et on se demande : est-ce que je suis dans un remake de The Game (David Fincher), dans Shutter Island (Dennis Lehane) ou dans Lost ? C'est le genre de piste à envisager quand on lit Franck Thilliez et qu'on a compris où il va puiser ses références (voir l'article "Thilliez fait son cinéma" dans L'Indic n°8). Sur fond de soupçon de manipulation mentale et d'expériences de la CIA, le lecteur ne sait pas ce qui est vrai ou faux, jeu ou réalité. Comme les personnages, il émet des hypothèses, et il est pris d'un brin de paranoïa. Alors pour un trajet en train et une récréation, la manipulation fonctionne, si vous ne voyez pas le truc venir, et si vous pouvez passez outre quelques phrases comme "il se rongeait les ongles comme un lapin mange une carotte". Le problème de ce puzzle, c'est que quelle que soit la pièce manquante, la solution a un goût de déception car elle ne parvient pas à surprendre. Elle faisait partie des possibles. L'explication évite de tomber dans le sensationnel et l'absurde, mais elle laisse un goût de caricature.
Franck Thilliez, Vertige, Fleuve Noir, 2013, 430 p., 20,90 €
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